mercredi 9 juillet 2014

Soutien aux éxilés de Calais



Après la rafle de 600 migrants à Calais le 2 juillet, 200 exilés en demande de protection ont été  enfermés dans des centres de rétention en France.
19 migrants érythréens et soudanais ont été placés au CRA de Rennes. Après 4 jours d'enfermement, ils ont été libérés par la préfecture du Pas de Calais avant d'être présenté devant le JLD. Ainsi pas de trace d'une procédure bâclée qui méprise la loi et les hommes et des violences policières.

A la sortie du CRA, les exilés de Calais ont été pris en charge à la sortie du CRA par des militants qui les ont conduit dans un local mis à disposition par le Parti de Gauche. Ils y ont passé la nuit avant leur présentation devant le TA pour contester leurs OQTF.  

Compte-rendu "personnel'" de l'audience devant le TA par X. , militant du Collectif sans-pap de Rennes, morceaux choisis: 
Pas moins de 4 avocat-e-s se sont succédé pour plaider les 19 dossiers, qui ont occupé près de 3 heures d’audience. Les migrants sont passés par « paquets » de 2 à 6, en fonction des avocat-e-s, des pays d’origine, des situations. La juge administrative était particulièrement attentive et soucieuse de donner la parole aux migrants. Elle a décidé de prendre le temps de répondre sur les requêtes si bien que ses décisions ne tomberont que dans les jours à venir.

Petit voyage donc en Etat de droit(e) car, Etat de droit oblige, il fallait bien appuyer juridiquement la rafle et la mise en rétention arbitraire de ces centaines de migrants par notre état stationnaire de droite. Petit voyage qui permet de comprendre comment le « socialisme » contribue activement à la décomposition de toute confiance dans le Droit, cette vague institution qui a pu – un temps – nous bercer dans l’illusion de l’égalité (face à la loi).

Lors de leur rafle, les 19 migrants, ont tous été présentés à la police du Nord Pas de Calais et ont eu « droit » à une audition qui a systématiquement débouché sur la délivrance d’une OQTF et sur la mise en rétention. Ce matin, pour se défendre face aux recours des 19 migrants, la préfecture n’était pas représentée, n’a envoyé aucun mémoire en défense et s’est contentée de faire parvenir les PV d’audition policière ainsi que quelques vagues « preuves » assez éloignées de la conception que l’on peut avoir d’un travail préparé. Cette absence de préparation en dit déjà long sur le détournement de procédure qu’ont constitué la délivrance d’OQTF et la mise en rétention pour justifier la rafle et la dispersion géographique de ce que nous appelons, nous à gauche, des êtres humains.
Les 4 avocat-e-s ont pu alors s’en donner à cœur joie pour démonter consciencieusement tout le pseudo arsenal juridique utilisé par le Pouvoir rafleur. Les 4 ont attaqué la délivrance d’OQTF, les pays de renvoi, la mise en rétention. Et là festival d’arguments !

OQTF stéréotypées car pré rédigées avec mentions inutiles à rayer !

PV d’audition à charge qui négligeaient largement la trajectoire des migrants pour en venir au plus vite à la question de l’accord pour le retour et du droit préfectoral de délivrer des OQTF et d’enfermer en centre de rétention.

Absence de motivation des OQTF, voire de graves erreurs de motivation.

Absence d’examen de la situation personnelle de chaque migrant, comme le révèle la durée des auditions pour chacun (5 minutes !!!). Rien ou presque sur les motifs personnels, sur les persécutions, sur la vie privée et familiale, voire sur la date d’entrée en France. C’est vrai, c’est chiant à demander et à écrire mais c’est un droit des migrant-e-s de « raconter » cela avant qu’une décision ne soit prise !

Pour les migrants arrivés en France depuis quelques jours à peine, négligence totale du fait qu’ils souhaitent demander l’asile ou que la demande d’asile ne se fait pas sans avoir réglé deux ou trois trucs matériels (domiciliation, hébergement, nourriture, informations pour s’orienter).

Arrivée tardive des interprètes (au moment de la signature des PV d’auditions mais pas pendant leur déroulement) et des interprètes en anglais seulement.

Érythrée et Soudan désignés comme pays de renvoi…comme s’il s’agissait de simples destinations touristiques…

Article 3 et article 8 de la Convention européenne des Droits de l’Homme systématiquement cités comme n’ayant pas été violés, ce qui revient à dire que la préfecture a bien appris à se torcher avec cette convention lors des rafles !

Violation de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui proclame « le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre », autrement dit le droit de toute personne de faire des observations orales ou écrites face à ce qui lui arrive de négatif. Ce qui suppose plus de 5 minutes…

Ce festival concernait les 19 migrants mais plusieurs avaient en plus une histoire singulière qui en disait long sur le rapport au droit de la préfecture 62.

L’un était convoqué le 3 juillet à la préfecture pour déposer sa demande d’asile et il avait une convocation écrite ! Rien à foutre, OQTF quand même ! Et rétention quand même !

Deux autres avaient déjà une OQTF délivrée à la mi-juin mais avec un délai de 30 jours pour quitter le territoire. Rien à foutre, en rétention quand même !

Deux autres avaient un papier attestant qu’ils devaient rencontrer à Calais l’association chargée de leur expliquer les démarches d’asile. Rien à foutre, OQTF quand même ! 
Un autre était mineur mais rien à foutre, démarche d’expulsion et en rétention quand même !

Plusieurs avaient dans leur PV d’audition quelques éléments concernant leurs motifs de départ et les persécutions subies. On s’attend alors à trouver dans le PV une explicitation des démarches à faire en vue de demander l’asile. Mais non, la présentation des horreurs vécues est aussitôt suivie de la question sur l’accord pour le retour et sur la connaissance du droit préfectoral de délivrer une OQTF et d’enfermer. Le droit d’asile, rien à foutre aussi !
  
Voilà où on est dans un pays qui ose mettre en place un contrat d’accueil et d’intégration sur les valeurs républicaines avant de permettre à un-e étranger-e non UE de s’installer en France.

Le plus fou était de voir ces 19 migrants d’une vingtaine d’années, sans doute perdus car récemment arrivés en France et ne parlant pas français, déjà violentés dans leur parcours d’exil, maltraités depuis qu’ils sont arrivés en France, raflés, enfermés de manière arbitraire, libérés sans comprendre, etc., en train de demander à la France de les accueillir, même en prison car ce sera moins pire que là-bas…
  
Sur ces 19 migrants, 14 sont repartis pour Calais ce soir.
  

A la sortie du TA, les 5 soudanais qui ont choisi de rester à Rennes souhaitent "bonne chance" à ceux qui repartent pour Calais.
Les exilés de Calais restés à Rennes ont été pris en charge par les militants de "Un toit, c'est un droit".

 http://www.rennes.maville.com/actu/actudet_-rennes-19-migrants-de-calais-devant-le-tribunal-administratif_fil-2582559_actu.Htm

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