mercredi 25 novembre 2009

Référé Tribunal Administratif de Rennes, famille Z...

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE RENNES



REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


 N°095091



 M. Z.......

Mme Z......



M. Report Juge des référés



Audience du 18 novembre 2009



Ordonnance du 20 novembre 2009



Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2009, présentée pour M. Z...et Mme Z..., élisant domicile à la Croix Rouge française, 66 rue Dupont des Loges à Rennes (35000), par Me Le Verger : M et Mme Z...

demandent au juge des référés :

- d'ordonner au préfet d'Ille-et-Vilaine, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de leur indiquer, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au domicile de leur avocate, un lieu d'hébergement susceptible de les accueuillir ;

- de condamner l'Etat à verser à leur avocate, moyennant la renonciation de celle-ci à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 de code de justice administrative ;



M. et Mme Z..., de nationalité chinoise, exposent qu'ils sont arrivés en France le 17 août 2009, se sont rendus le jour même en préfecture, qu'ils s'y sont vus relever leurs empreintes digitales le 20 août 2009, ont déposé une demande d'asile le 24 septembre 2009, puis se sont vus délivrer un récipissé leur permettant de séjourner sur le territoire jusqu'au 21 décembre 2009 en qualité de demandeur d'asile ; que, depuis leur entrée en France, ils ont régulièrement sollicité un hébergement sans qu'aucune solution ne leur soit proposée alors que Mme Z... est enceinte depuis plus de cinq mois ; que leur demande de prise en charge demeure toujours sans réponse ; ils font valoir :

 - que la condition d'urgence est remplie dès lors qu'ils ne se sont vus proposer aucune solution d'hébergement depuis leur entrée en France malgré d'incessantes démarches, ce qui les a amenés à passer plusieurs nuits dans la rue ; qu'ils n'ont pu à cet égard bénéficier que de l'aide de la Ville de Rennes et de la commune de Noyal-Chatillon-sur-Seiche alors que le préfet ne leur a proposé, le 10 septembre 2009 qu'un hébergement en camping à 30 kms de Rennes, ce qu'ils n'ont pu que refuser ;

 - que le refus de prise en charge dont ils sont l'objet porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale constituée par le droit de solliciter l'asile qui implique qu'ilq puissent bénéficier, conformément à ce que prévoient les articles 3-1 et 13 de la directive 2003/9 CE du 27 janvier 2003, de conditions matérielles d'accueil tel un logement ;

- que ce refus est manifestement illégal ; qu'en effet, les stipulations de la directive 2003/9 CE du 27 janvier 2003 doivent être respectées dès que le demandeur d'asile à déposé sa demande en ce sens sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile auprès de l'OFPRA et les a autorisés à se maintenir provisoirement sur le territoire, il ne leur a fourni aucune information sur les centres d'accueil pour demandeurs d'asile susceptibles de les prendre en charge ;

- que le préfet ne peut se prévaloir de l'absence de places d'hébergement disponibles pour justifier l'impossibilité de leur proposer un logement dès lors qu'ils se trouvent en situation de grande précarité et qu'ils répondent aux conditions prévues notamment par les dispositions des articles L. 111-2, L. 345-1 et L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles qui, notamment, imposent au préfet de proposer une réponse immédiate aux personnes en difficulté dans le cadre du dispositif de veille sociale mise en place dans chaque département ;



Vu le mémoire, enregistré le 18 novembre 2009, par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête ;



Le préfet expose qu'une offre de prise en charge d'hébergement en CADA à été proposée aux intéressés, entrés en France le 15 août 2009, dès la date du 1er septembre 2009, à laquelle ils se sont vus délivrer une autorisation provisoire de séjour ; qu'ils perçoivent depuis le 20 octobre 2009 l'allocation temporaire d'attente ;



Vu l'ensemble des pièces du dossier ;



Vu la directive 2003/9 CE du 27 janvier 2003 ;



Vu le code de l'entée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;



Vu le code de l'action sociale et des familles ;



Vu le code du travail ;



Vu le code de justice administrative ;



Vu la décision par laquelle le président du tribunal a désigné M. Report, premier conseiller, pour statuer sur les demandes en référés ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;



Après avoir au cours de l'audience publique du 18 novembre 2009 présenté son rapport et entendu :

 - les observations de Me Le Verger, avocate des requérants, qui précise que Mme Z... est enceinte de cinq mois, soutient en outre, que l'offre de prise en charge en CADA faite aux intéressés par le préfet n'est pas conforme aux exigences des textes applicables en matière d'accueil des demandeurs d'asile ; qu'il appartient au préfet, le cas échéant, de procéder à des réquisitions de logement vaccants ;

- les observations de M. Coconnier et M. Fraboulet, représentant le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui indiquent à l'audience que, pour environ un millier de demandeurs d'asile présents en Bretagne et dont le nombre a augmenté de 66% entre 2007 et 2008 et de 31% depuis le premier janvier 2009, la capacité pour leur hébergement en Ille-et-Vilaine est actuellement de 339 places en CADA, en augmentation de 57% depuis 2004, à laquelle il y a lieu d'ajouter 130 places d'hébergement temporaire de doit commun dont ils sont susceptibles de bénéficier at qui devraient passer à 150 places d'ici la fin 2009 ; ils indiquent, par ailleurs, que les intéressés sont considérés comme particulièrement prioritaires pour obtenir un hébergement compte tenu du fait que Mme Z...est enceinte ; ils soutiennent, en outre, que pour apprécier la condition d'urgence, il y a lieu de tenir compte également de l'intérêt public et de prendre en considération la question de l'attribution de logements à toutes personnes en difficulté dans le contexte d'une offre d'hébergement tendue ;





Sur l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :



Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se pronnonce dans un délai de quarante-huit heures."; qu'au sens de ces dispositions, la notion de liberté fondamentale englobe, s'agissant des ressortissants étrangers qui sont soumis à des mesures spécifiques réglementant leur entrée et leur séjour en France, et qui ne bénéficient donc pas, à la différence des nationaux, de la liberté d'entrée sur le territoire, le droit constitutionnel d'asile qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié, dont l'obtention est déterminante pour l'exercice par les personnes concernées des libertés reconnues de façon générale aux ressortissants étrangers ; que la privation du bénéfice des mesures prévues par les conventions internationales et par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes jusqu'à cde qu'il ait été statué définitivement sur leur demande est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté ;



Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la directive 2003/9 CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile : " Définitions. Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) j) "conditions matérielles d'accueil" : les conditions d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, fournis en nature ou sous forme d'allocation financière ou de bons, ainsi qu'une allocation journalière (....). "; qu'aux termes de son article 13 : " (...) 1. Les Etats membres font en sorte que les demandeurs d'ailes aient accès aux conditions matérielles d'accueil lorsqu'ils introduisent leur demandes d'asile. / 2. Les Etats membres prennent des mesures relatives aux conditions matérielles d'accueil qui permettent de garantir un niveau de vie adéquat pour la santé et d'assurer la subsistance des demandeurs. / (...) 5. Les conditions d'accueil matérielles peuvent être fournies en nature ou sous la forme d'allocations financières ou de bons ou en combinant ces formules. Lorsque les Etats membres remplissent les conditions matérielles d'accueil sous forme d'allocations financières ou de bons, l'importance de ces derniers est fixée conformément aux principes définis par le présent article; " ; qu'aux termes de l'article 14 : " Modalités des conditions matérilles d'accueil : (...) 8. Pour les conditions matérielles d'accueil, les Etats membres peuvent, à titre exceptionnel, fixer des modalités différentes de celles qui sont prévues dans le présent article, pendant une période raisonnable, aussi courte que possible, lorsque : (...) les capacités de logement normalement disponibles sont temporairement épuisées (...) " ; qu'en application des dispositions des articles L. 348-1 et suivants et R. 348-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles les demandeurs d'asile peuvent être admis à l'aide sociale pour être accueillis, sur décisions prises par leurs gestionnaires avec l'accord du préfet, dans les centres pour demenadeurs d'asile, et que ceux qui ne bénéficient pas d'un niveau de ressources suffisant bénéficient d'une allocation mensuelle de subsistance, dont le montant est fixé par l'article 3 de l'arrêté du 31 mars 2008 portant application de l'article R. 348-4 du code de l'action sociale et des familles ; qu'ils ont également vocation à bénéficier du dispositif de veille sociale prévu par l'article l. 345-2 du code de l'action sociale et des familles, lequel peut conduire à leur admission dans un centre d'hébergement d'urgence ou un centre d'hébergement et de réinsertion socaile ; qu'enfin, en vertu des articles L.5423-8-1° et L. 5423-9-2° du code du travail les demandeurs d'asile qui ont démandé à bénéficier du statut de réfugié peuvent bénéficier, sous condition d'âge et de ressources, d'une allocation temporaire d'attente à condition de ne pas être bénéficiares d'un séjour en centre d'hébergement pris en charge au titre de l'aide sociale ; Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir délivré un document provisoire de séjour à M. et Mme Z..., entrés en France le 15 août 2009 et qui ont déposé leur demande d'asile le 1er octobre 2009, le préfet d'Ille-et-Vilaine a proposé le 1er septembre 2009 aux intéressés, qui ont accepté, une prise en charge d'hébergement au centre d'accueil pour demandeurs d'asile et les a orientés vers la plate-forme d'accueil de Rennes ; que, dans l'attente d'une place disponible soit dans un tel centre, laquelle est attribuée par décision de son gestionnaire selon un ordre de priorités qui s'explique par l'écart actuel entre le nombre des demandeurs d'asile et la capacité de ces établissements d'accueil, soit, si nécessaire, dans un centre d'hébergement d'urgence ou dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, M.et Mme Z... ont été admis au bénéfice de l'allocation temporaire d'attente qui leur est versée depuis le 20 octobre 2009 ; que, dans ces conditions, les réquérants ne peuvent valablement soutenir que " leur demande de prise en charge est réstée sans réponse" et que le préfet leur " refuse d'accorder les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile " telles qu'elles résultent des obligations qu'il est tenu de respecter en vertu des sptipulations de la directive du 2è janvier 2003 transposée par les dispositions des textes nationaux précités ; qu'ainsi, ils ne justifent pas d'une illégalité dont le caractère manifeste aurait en effet de constater une atteinte grave à la liberté fondamentale constituée par leur droit de solliciter la qualité de réfugié ; que, par suite, et en tout état de cause, les conclusions de M. et Mme Z... tendant à obtenir du juge des référés qu'il pronnonce en ce sens une injonction au préfet d'Ille-et-Vilaine ne peuvent qu'être rejetées ;



Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :



Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce sens que l'Etat, qui n'est pas partie perdante à l'instance, soit condamner à verser à l'avocate de M. et Mme Z....la somme réclamée sur ces fondements ;



ORDONNE :



 Article 1er : La requête de M. et Mme Z... est rejetée.



Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M et Mme Z...et au préfet d'Ille-et-Vilaine.



Copie en sera délivrée au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.



Fait à Rennes, le 20 novembre 2009.



Le juge des référés P. Report



Le greffier G Moisson



La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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