jeudi 27 octobre 2011

Quand les référés du Dal35 obligent la Préfecture à revoir sa copie. Explications



CR audience référés du 18/10/11 contre refus renouvellement APS + hébergement



Au cours de cette audience, nous avons eu droit à un état des lieux sur l'hébergement des demandeurs d'asile en Bretagne par M. Erb, coordinateur régional de l'hébergement des demandeurs d'asile à a Préfecture du 35, assisté des habituels autres représentants préfectoraux : Coconier, Fraboulet et Laloyer.



Mr Erb commente un échange de mails (joints au dossier du juge) avec les responsables des centres départementaux qui gèrent les centres d'hébergement, et avec l'OFII qui gère le dispositif national.



Conclusion :



1) Le dispositif est saturé, il n'y a aucune place disponible en Bretagne. Il précise que des efforts ont été faits par les services de l'Etat pour mieux gérer les structures et que 2 postes ont été créés" (dont le sien).



2) Me Erb signale que des places en CADA se sont récemment libérées à Fougères...



3) II reconnaît aussi un manque de places en SHT, le dispositif d'urgence étant également saturé.



4) Il admet être de plus en plus souvent contacté par le CHU pour la mise à l'abri de personnes très malades.



La Préfecture a présenté 3 tableaux dans lesquels elle trie les demandeurs d'asile par ordre priorité :



1) Le public considéré comme très prioritaire (demande du CHU, femmes enceintes..),



2) Le public considéré comme prioritaire (famille avec enfants, étrangers malades...),



3) Le public considéré comme non prioritaire (hommes célibataires).



Juge n°1





Situation 1 :



Mme A., mère de famille ossète avec un enfant de 5 ans, a été reçue par la Préfecture la veille pour la délivrance d'un récépissé suite au dépôt du référé, d'où non-lieu pour le refus de renouvellement de l'APS.(Autorisation Provisoire de Séjour)



Mme A. est également hébergée depuis 2 jours par le 115 à l’hôtel . A la demande du juge, le représentant de la Préfecture a précisé que cette mise à l'abri serait prolongée jusqu'à l'obtention d'une place en CADA.



La juge a prononcé un non-lieu également pour l'hébergement, mais elle a cependant fait remarquer l'absence de diligence de la Préfecture pour Mme A. avant que le Dal35 ne dépose des dossiers de référés.





Situation 2 :



M. P., arménien malade considéré comme très prioritaire par la Préfecture. Comme pour le cas précédent, la Préfecture a fait diligence après le dépôt du référé par le Dal35 en fournissant aussitôt un récépissé et une place au 115. D'où un nouveau non lieu concernant ces référés APS et hébergement.





Situation 3:



M. M., ossète cousin de Mme A. Idem que pour les cas précédents, la Préfecture n'a fait diligence Qu'après le dépôt du référé en fournissant un récépissé et une place au 115, d'où encore une fois non lieu pour ces référés APS et hébergement.





Juge n°2





Le juge a commencé par dire son étonnement de se retrouver à nouveau devant des requérants pour le refus de renouvellement APS + hébergement, alors que la Préfecture a déjà été condamnée 15 jours plus tôt pour cette pratique illégale...



M. Erb, quelque peu penaud,, précise que qu'ils ont cessé cette pratique et que l'ATA (allocation temporaire d'attente équivalant à 10 € pour jour) sera reversée avec effet rétroactif.



Malgré les injonctions du Tribunal Administratif de reloger les 4 précédents requérants sous 8 jours, Mélanie Le Verger, avocate du Dal35, précise que seulement 2 d'entre eux ont obtenu une place en CADA et que les 2 autres sont toujours à l'hôtel.





Situation 4 :



M. N., Congolais. Suite à son refus de domiciliation par la préfecture, M. N. s'est présenté à l'UAIR, autre association rennaise habilitée à domicilier les demandeurs d'asile, mais nouveau refus. Il s'est alors présenté tous les jours à la Préfecture pour tenter d'obtenir une APS, qui ne lui a été délivrée qu'après le dépôt de référé.



Le juge ne trouve son nom dans aucune liste. "Vous l'avez perdu ?" demande t-il. " C'est ennuyeux si vous perdez la trace des demandeurs d'asile vous sollicitant ".



Conséquence : un non lieu pour l'APS et une injonction à fournir un hébergement sous 8 jours.





Situation 5 :



M.P., jeune coréen du nord âgé de 19 ans.



Le juge s'étonne que ce jeune majeur ne soit pas considéré par la Préfecture comme public prioritaire.



Mélanie Le Verger explique que M. P. est véritablement à la rue depuis 1,5 ans et dans une grande détresse. Elle précise que cette situation peut durer encore des mois, car la procédure d'asile pour cette nationalité est particulièrement longue.



Comme ses prédécesseurs, M. P. a obtenu la veille de l'audience une APS avec une autorisation de travail.



Le juge découvre que les demandeurs d'asile peuvent obtenir l'autorisation de travailler lorsqu'ils sont en recours.



L'avocate du Dal35 lui explique que cela s'apparente davantage à "une arnaque"... Pour le juge, ce droit au travail ne dispense pas la Préfecture de fournir aux demandeurs d'asile des conditions d'accueil décentes.



M. P. n’apparaît également dans aucun tableau. Le juge le retrouve finalement dans le dispositif régional, alors qu'il est domicilié à Rennes.



Mélanie Le Verger en profite pour dénoncer ce dispositif instauré par la Préfecture du 35 en juin qui impose des quotas de domiciliation à chaque département en envoyant les demandeurs d'asile à St Brieuc, Vannes ou Brest avec une domiciliation sèche sans accompagnement, ni hébergement.





Conséquence : un non lieu pour l'APS et une injonction à fournir un hébergement sous 8 jours.





Situation 6:



M. A. est somalien. Une attestation de l'AFTAM prouve que M. A. appelle régulièrement le 115 mais n'a jamais bénéficié d'une seule nuit d'hébergement depuis son arrivée en France en mars 2011.



M.C., représentant de la Préfecture, affirme que ce document fourni par la PADA est un faux et que des sanctions seront prises à l'encontre de son auteur.



L'avocate du Dal35 précise qui s'agit d'une démarche collective de la PADA fournissant à la demande du Dal35 un formulaire type sur lequel a été ajouté manuellement une phrase sur les conséquences du non renouvellement du récépissé.



« Encore un nom qui n’est dans aucun tableau ? », s'inquiète le juge, « ça ressemble à du boneto. Si on ne jouait pas avec les gens, ça pourrait être drôle. On l'a encore perdu ! ».



Conséquence : un non lieu pour l'APS et une injonction à fournir un hébergement sous 8 jours.









Malgré les ruses employées la Préfecture pour échapper à la justice en convoquant les requérants dès le dépôt des référés pour leur fournir récépissé et une place au 115, le Dal35 a donc obtenu 3 injonctions sur 6 dossiers de fournir un hébergement sous 8 jours.



Les 6 non-lieux pour les refus des récépissés évitent une condamnation de la Pr"fecture, mais ces référés ont permis de mettre un terme à ces nouvelles pratiques inhumaines et dégradantes de la Préfecture du 35 qui laissaient les demandeurs d'asile à la rue et les privaient de l'ATA, leur unique moyen de subsistance.






1 commentaire:

  1. Il est important que cette victoire du DAL et de son avocate ne soit pas l'arbre qui cache la forêt: en effet, peu de citoyens et juristes restent attentifs aux excès de pouvoir constants de l'État et de sa préfecture. Ces grignotages et abus de pouvoir sont en effet quotidiens et nécessitent pour qu'ils cessent de la vigilance, du temps, du travail et un peu d'audace! Et la mobilisation de bien plus de citoyens!

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